Homélie pour le deuxième dimanche de Carême
Année A - Mt. 17, 1-9
par
le Père Daniel Meynen
"Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère et les conduisit à l'écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux : son visage prit l'éclat du soleil, ses vêtements devinrent lumineux de blancheur. Et voici que Moïse et Elie leur apparurent s'entretenant avec lui. Pierre prit alors la parole : «Seigneur, dit-il, c'est heureux que nous soyons ici ; veux-tu, je vais faire trois abris, un pour toi, un pour Moïse et un pour Elie.» Il parlait encore qu'une nuée lumineuse les vint couvrir ; et de cette nuée une voix disait : «Voici mon Fils bien-aimé ; j'ai mis en lui toute mon affection : écoutez-le.» A ces mots, les disciples tombèrent face contre terre, saisis d'effroi. Mais Jésus s'approcha d'eux, les toucha et leur dit : «Levez-vous, n'ayez pas peur.» Ils levèrent les yeux et ne virent plus que Jésus seul.
"Pendant qu'ils descendaient de la montagne, Jésus leur fit cette défense : «Vous ne raconterez à personne ce que vous venez de voir, avant que le Fils de l'Homme ne soit ressuscité des morts.»"
Homélie :
"Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère et les conduisit à l'écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux : son visage prit l'éclat du soleil, ses vêtements devinrent lumineux de blancheur."
Le deuxième dimanche de Carême est consacré au Mystère de la Transfiguration du Seigneur. C'est-à-dire que l'Eglise nous demande de nous arrêter un peu sur cet événement de la vie du Seigneur, afin d'en retirer quelque profit spirituel pour notre cheminement vers Pâques.
Ce Mystère de la Transfiguration a profondément marqué l'esprit d'un des assistants : Pierre ! La preuve en est que Pierre n'a pu s'empêcher de raconter ce qu'il avait vu. Il le fit en écrivant dans sa deuxième épître : "Ce n'est pas sur la foi de fables habilement imaginées que nous vous avons fait connaître la puissance et l'avènement de notre Seigneur Jésus Christ, c'est pour avoir vu sa majesté de nos propres yeux. Car il reçut de Dieu le Père honneur et gloire, quand du sein de la Gloire magnifique se fit entendre cette voix : «Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis toute mon affection.» Nous-mêmes, nous avons entendu cette voix venant du ciel, quand nous étions avec lui sur la montagne sainte." (2 P. 1, 16-18)
Cette insistance de l'Apôtre est importante pour l'Eglise de tous les siècles ! Elle montre combien ce Mystère de Jésus transfiguré doit faire partie de toute sa vie dans le monde qu'elle est appelé à transformer par la foi en sa mission ! Or, le monde que l'Eglise doit transformer, c'est d'abord ce monde qui la compose elle-même. Car l'Eglise se compose d'hommes et de femmes qui vivent dans le monde et qui viennent du monde. L'Eglise est le Corps du Christ qui donne au monde un visage nouveau : celui de la Gloire du Père en Jésus ! L'Eglise engendre sans cesse de nouveaux enfants qui sont ces hommes et ces femmes du monde entier appelés à croire au Sauveur et à manifester leur espérance en la vie éternelle qui est en Dieu !
La Transfiguration de Jésus nous montre déjà quelle sera la Gloire de Dieu, celle qui nous est promise en partage pour l'éternité : la Transfiguration de Jésus manifeste déjà, mystérieusement, quelle sera la réalisation de notre espérance en la vie éternelle qui est en Dieu ! Semblablement, les sacrements de l'initiation chrétienne, le Baptême, la Confirmation, l'Eucharistie, nous ressuscitent déjà dans le Christ : ils font de nous d'autres Christs. Mais cette résurrection par les sacrements n'est qu'un commencement de l'éternelle Résurrection qui se manifestera à la fin des temps. Car la Transfiguration de Jésus eut lieu sur le chemin de sa Passion : lorsque Jésus fut transfiguré, il n'était pas encore ressuscité !
Saint Pierre n'a pas manqué de parler de cette espérance qui est en nous et qui se fonde sur notre propre transfiguration intérieure : "Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ ! Dans sa grande miséricorde, il nous a fait renaître par la résurrection de Jésus Christ d'entre les morts, pour une espérance vivante, pour un héritage qui ne se peut corrompre, souiller ni flétrir, et qui vous est gardé dans les cieux, à vous que la puissance de Dieu réserve, à cause de votre foi, pour le salut qui est prêt à se manifester dans les derniers temps." (1 P. 1, 3-5) Ce que Saint Paul redira en termes concis : "C'est en espérance que nous sommes sauvés." (Rm. 8, 24)
La Transfiguration de Jésus eut lieu sur le chemin de sa Passion. Cet événement eut donc pour effet de stimuler l'espérance des disciples de Jésus : il fallait qu'ils aient vu cette Gloire de Dieu avant de voir leur Maître réduit à rien lors de sa Passion. Lorsque Jésus apparut défiguré, couverts de crachats, humilié, et finalement renié par son propre Peuple, il fallait que les disciples aient en mémoire cet événement extraordinaire que fut la Transfiguration. Sans cela, leur espérance aurait complètement disparu. Leur foi s'éteignit en effet complètement (sauf celle de Marie), mais une lueur d'espoir persistait en eux en ce moment terrible : c'était celle de la Transfiguration !
Notre célébration de ce jour est elle aussi une sorte de transfiguration : nous allons acclamer le Seigneur dans l'acte de son Sacrifice, et pourtant il n'y aura aucune manifestation sanglante de la victime. Au contraire, ce que nous goûterons aura la douceur du lait et du miel, pour employer ici une image de la Sainte Ecriture. Jésus se présentera à nous sous l'aspect du Pain et du Vin, et il nous conviera au Banquet des Noces de l'Agneau ! Que Marie, qui vécut une autre Transfiguration au jour de l'Incarnation, nous aide de sa prière toute-puissante : que Marie soit la Mère de notre Sainte Espérance !
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